La Caïque de A à Z
Une rubrique d’Odile Prouveur pour connaître notre navire
ALEUSES : Deux fortes pièces de bois longitudinales situées à l’avant permettant au mat d’être levé et de porter la grand voile ou abaissé en se rabattant sur la miche.

BARROT : Pièce transversale servant de poutre pour supporter le pont. La photo montre les barrots en cours de réfection et les hiloires en attente de pose en 2019.

BRION : Pièce servant à lier la quille avec l’étrave. Par extension on utilise parfois ce terme pour désigner la courbe entre la quille et l’étrave « en venant échouer sur la plage, la caïque pose son brion sur les galets »

CACHOUTER : On appelle ainsi la façon de traiter une voile, un cordage, un vêtement en fibres naturelles afin de les protéger de toute putréfaction par une sorte de tannage réalisé avec du cachou (rocou du rocouyer) donnant des teintes allant de l’ocre jaune à l’ocre brun.
CALFATAGE : Action de calfater c’est à dire boucher les joints des bordages d’un navire avec des cordons d’étoupe ou de coton afin de fermer tout accès à l’eau. Ces cordons sont enfoncés avec force au moyen de fers à calfat et un maillet. On termine l’opération en couvrant l’étoupe de brai, ce qui l’empêche d’être pourrie par l’eau.

CARÈNE : Parties immergées de la coque (synonyme œuvres vives). CARÉNAGE : Nettoyage et protection antisalissures (peinture antifouling) de la carène
CHANTIER NAVAL : Avant 1914, quelques caïques sont construites à Yport et Etretat mais la majorité le sont dans les chantiers Charles Chantelot et Fils, Adolphe Capon, Albert Massé et Belfort Fiquet à Fécamp.
CLINS : Disposition particulière des bordages se chevauchant telles des ardoises d’un toit issue des constructions des Vikings.

DIESEL : « C’est un diesel ! …Expression couramment employée à bord de la caïque «VIERGE DE LOURDES » à l’encontre de ceux qui s’étonnent de ce joli bruit: il s’agit d’un moteur Baudouin DK3 (démarrage à air comprimé, avec appoint possible de «cigarettes » en cas de basses températures).
DOS PLATS : Nom donné aux Etretatais qui lors des lancements des navires équilibraient les caïques en les poussant avec le dos.
ESPAR : Pièces de bois composant la mâture.
FERLER : Se dit de la manière de relever les voiles pli par pli sur un espar où elle est ensuite RABANTÉE. A bord le FOC n’est jamais ferlé. Seules la GRAND VOILE et le TAPE-CUL sont en quelque sorte enroulés sur la VERGUE puis fixés par les ÉCOUTES ou les DRISSES en guise de rabans avec la réalisation d’un beau TRANSFILAGE.
FOC : La plus petite des voiles du bord, située à l’avant du navire, de forme triangulaire. Fixée entre la tête du grand-mât et l’extrémité de la CHIQUE (bout dehors, pointant légèrement vers le bas).
GRAND-VOILE : Par définition, voile représentant la plus grande surface de toutes. C’est une voile AU TIERS (sur la caïque) gréée sur une VERGUE (grand-vergue) hissée sur une drisse au GRAND-MÂT et réglée par une ÉCOUTE, BORDÉE ou CHOQUÉE suivant les changements d’ ALLURES.
HA : Terme désignant une sorte de requin ou chien de mer. Sur la plage d’ Yport, dans les années 1900, au moment de la vente du poisson, les femmes des pêcheurs, après les avoir vidés et étripés les alignaient par groupe de vingt; les chiens -autre sorte de requins- et les roussettes étaient vendus par groupes de 25+1. Congres, raies et autres tombes ou grondins faisaient partie du tableau de la petite pêche pratiquée par les caïques d’ Yport et d’ Etretat.
HILOIRES : Les surbaux sont parfois appelés, et à tort, du nom d’hiloires. Pièces qui forment l’encadrement des écoutilles; ceux qui sont à l’avant ou à l’arrière sont fixés sur les barrots (ou baux) qui limitent les écoutilles d’où le nom de surbaux. Ceux qui se trouvent dans le sens de la longueur du navire s’appellent quelquefois élongis de surbaux. Ci-dessous la dépose des hiloires en 2017.

IDIOME : En parlé CAUCHOIS, des expressions locales sont des plus pittoresques ou savoureuses…Aller à pommes : c’est relever le filet des autres. Il va de soi que pour cette action pas très catholique un bonnet ou une mitaine est mise sur la statue de la vierge au pied de la MICHE « pour pas qu’elle voye ou qu’elle entende ».
JAMBETTES : Parties hautes des MEMBRURES maintenant le PAVOIS (partie de la coque au dessus du pont).

LOUGRE : Voilier souvent utilisé au 18ème et 19ème siècle le long des côtes de la Manche et de l’Atlantique pour la pêche du hareng et du maquereau, le cabotage ou la surveillance du littoral. Son gréement : trois mâts et trois voiles au tiers influence nettement celui de la caïque. A Fécamp il disparaît avec l’arrivée du DUNDEE à la fin du 19ème siècle.
MAT : Deux seuls survivent. Lors de la pêche au hareng, le grand-mât se rabat entre les ALEUSES. Cette manœuvre peut s’avérer fort utile en cas de fort vent et grosse mer afin de diminuer fardage et ballant.
MICHES : Sortes de fourches en bois,spécifiques aux caïques, servant à supporter les espars. La photo montre les deux miches de la Caïque Vierge de Lourdes

MILLE : Unité de longueur correspondant à une minute d’angle d’un grand cercle terrestre, soit 40000000 m /(360*60)=1852 m.
MOTEUR : Engin lourd, bruyant et puant mais parfois utile pour ne pas être en retard à condition toutefois que ce ne soit pas le moment où il se décide à faire grève !
NOROIS ou NOROÎT : Altération dialectale de Nord-Ouest. Vent venant de la mer et soufflant du Nord-Ouest. En cauchois, le vent de Nordet désigne un vent soufflant du Nord-Est, le vent d’amont qui est l’Orient – souffle de l’Est, Nord -Est, en opposition au vent d’Aval ou AVA qui se dit pour l’occident. Vent de mer d’Ouest.
NOYADE : Malheureusement, elles peuvent survenir en mer à bord des caïques. C’est à cet effet que des filières ont été ensuite installées à bord de la caïque « VIERGE DE LOURDES ». Après ces funestes accidents, lors du dépôt de gerbes,l’usage veut qu’elles soient contournées par un angle de 360 °.
ORME : Bois de charpente utilisé pour la construction des caïques, essentiellement pour la QUILLE et les VARANGUES -pièces de bois assemblées pour former la structure des fonds-, l’alternance de sécheresse et d’humidité ayant moins d’effet sur la coque que le chêne. C’est pour cette raison qu’il est également choisi préférentiellement pour la construction des BORDES (lattes de bois formant la partie externe de la coque, à CLINS, CARVELLES et RIVETES). Ce bois dont la cohésion élevée est due à ses fibres entrelacées offre une qualité indéniable pour la construction à clins. Les autres pièces de charpente : ETRAVE, ETAMBOT (parties avant et arrière du navire), TABLEAU-ARRIERE, MASSIFS et MEMBRURES (Ossature du navire) sont réalisées en CHÊNE.
PEAUX-ROUGE : Surnom attribué aux Fécampois en raison de l’ocre rouge, teinture provenant du CACHOU, qui loin d’être grand teint, déteignait de leur « flanelle » sur leur peau. Par un arrêté municipal, la Ville d’ Yport interdira le CACHOUTAGE des voiles des caïques sur la plage afin de ne pas importuner « les BAIGNEUX ».
PLAT-BORDS : Bordages horizontaux tout autour d’un bateau recouvrant la tête des membrures ou les entourant. Sur la photo ci-dessous c’est la partie la plus foncée du pont.

POTS : Le « t » se prononce. Il s’agit de grandes MANNES (paniers de forme cylindrique évasée) en osier tressé destinées surtout à y recevoir les CORDES munies d’hameçons montés à intervalles réguliers pour pratiquer la PÊCHE AUX CORDES. Les lignes employées sont formées d’un fort cordage sur lequel sont fixés à une brasse (1,60 m environ) de distance l’un de l’autre des EMPÊQUES : bouts de ligne de pêche ordinaires, longs également de près d’une brasse et munis chacun d’un hameçon. La ligne amorcée ou BOUETTEE- de pieuvres, maquereaux, harengs, appâts les plus couramment utilisés- est lovée avec soin dans une manne de façon à pouvoir être filée sans s’embrouiller, et gare à un doigt qui traîne :il risque de prendre la place d’un poisson…On peut tendre ainsi des kilomètres de ligne. En toutes saisons cette pêche, une des plus importantes, est pratiquée par des marins Yportais ou Etretatais : elle permet la capture entre autres poissons de congres, roussettes, morues -autour des années 1900-, raies etc…
QUILLE : De l’ancien scandinave KILIR, désigne la forte pièce en bois longitudinale inférieure, à la base de la charpente d’un navire. Contrairement à un « quillard », voilier de compétition d’un tonnage plus élevé qu’un « dériveur » doté lui aussi d’une quille aussi importante que la partie immergée d’un iceberg pour le stabiliser, celle des CAÏQUES ressemblerait plutôt à la lame d’un patin à glace : c’est pourquoi on peut parler pour elles de leur faible TIRANT D’EAU; pour la Caïque VIERGE DE LOURDES il est de 0,90 m. Lorsqu’elles sont transformées en CALOGES, cette quille est profondément enfouie dans le sol. Un toit de chaume ou de planches transforme alors le navire fatigué de prendre la mer en abri pour les filets, les SENNES, les cordages, les apparaux de pêche, les QUART-A-POCHE.
RAIE : Selon le témoignage récent d’une Yportaise, il y a deux manières de saisir une raie. Une femme la saisira par le dessus, yeux ou ouïes, un homme par le dessous, anus….., à chacun sa manière d’éviter la partie caudale beaucoup trop agressive !
SUET : Est un vent de Sud-est.
SUROÎT : Vent pluvieux du Sud -ouest des côtes françaises de l’Atlantique et de la Manche souvent accompagné de pluies, il en vient tout naturellement à désigner ce chapeau imperméable en toile huilée dont l’arrière descend sur la nuque et protège ainsi les marins pêcheur des intempéries.
TAPE-CUL : Voile au tiers situées le plus en arrière du navire (le Cul, en marine ce n’est pas trivial, par exemple battre en arrière se dit également CULER). Elle est enverguée sur le mât d’artimon. Elle déborde largement le tableau arrière grâce à l’ ARGUENI, un bout dehors arrière appelé sur d’autres types de gréements au tiers QUEUE DE MALET. Comme son nom ne l’indique pas, cette voile, lors des pêches dérivantes permet de maintenir le NEZ dans le vent et ainsi stabiliser le navire.
TOULINE : Cordage de fin diamètre terminé par une pomme sphérique lestée servant à haler l’œil des aussières, amarre lancée du bord vers le quai où un lamaneur peut la récupérer à terre afin d’amarrer le navire ensuite sur une BITTE d’amarrage ou un BOLLARD.Conseil d’un ancien, en visant la tête du préposé au lamanage, le lance -amarres a plus de chances de lui atterrir dans les mains.
UNIFORME : S’il n’est de rigueur à bord, l’article 7 du règlement intérieur de l’association «CAÏQUE VIERGE DE LOURDES » demande à tous un respect des traditions de par sa tenue et son comportement,ainsi sont tacitement prohibés shorts, tenues «fluo » ou excentriques au profit de couleurs indigo ou « rouge normand » en harmonie avec le brun rouge des voiles ou le vieux rose d’un cachou délavé. Si la « VAREUSE » n’est pas imposée, elle n’en est pas moins le vêtement idéal sa poche intérieur empêche le contenu de verser, son bouton de col monté de l’intérieur pour éviter qu’il ne se croche. Enfin son grammage serré de la toile permet de n’avoir ni trop « freid » ni trop « caud ». Quoiqu’il en soit, c’est à l’ UNISSON que les matelots conjuguent leurs efforts pour coordonner toutes manœuvres sur les 77 m2 de la VOILURE.
VIRER : Quand la pêche est terminée, LE MOUSSE DE TERRE court chercher les hommes et les femmes de l’équipage ‘LES VIREUSES ou VIEUSES. Il est chargé de jour comme de nuit de la surveillance du bateau, de son lancement, et à son retour de pouvoir assurer un VIRAGE immédiat dès l’atterrissage. Les caïques des frères Ebran sont reconnaissables à LEURS COULEURS MARIALES. Les mâts blancs cerclés de bleu, le blanc de la LISSE et du PAVOIS et sa bande bleue symbolisent à leurs yeux « le bas du manteau de la vierge ».
Une bonne douzaine de personnes, femmes renforcées de quelques vieux matelots s’apprêtent à virer au cabestan. Sur un arbre de 1.50 m de haut vient s’enrouler le câble de halage. Dans la partie haute, par des trous percés perpendiculairement, des longs bras forment levier, un cliquet empêche tout retour en arrière. La rapidité des premiers mètres du virage est primordiale afin de mettre le bateau hors de portée de la lame. Dès que la caïque commence à s’échouer, l’équipage saute à terre et aide à déhaler, puis il faut prendre le bateau à dos pour le redresser droit sur sa quille afin de réduire le frottement. De surcroît, des pans (pièces de bois de forme particulière) sont placés dessous, suiffés ou bien graissés dans des entailles pratiquées au milieu pour recevoir la quille, ils sont munis de bouts passant dans des trous latéraux ce qui permet de les déplacer aisément au fur et à mesure de leur progression. Chaque bateau en possède un jeu d’au moins huit pièces.
WATT : Cette unité de mesure de puissance électrique n’est pas utilisée à bord hormis pour les feux de route ou feu de position. En ce qui concerne la pêche au hareng, l’éclairage utilisé se compose de lampe au carbure ou lampe à acétylène.
WINCHES : Poupées à cliquet servent à démultiplier les efforts de traction pour les manœuvres, notamment des ÉCOUTES et des DRISSES à bord des voiliers de plaisance et de compétition. Bien évidemment cette invention récente est totalement « inconnue » à bord des caïques, c’est à la seule force des bras que l’équipage composée de six à huit marins effectue les manœuvres. C’est à la barre non loin de leurs winches que les Pajot et les Peyron dans les années 1995, lors du trophée des multicoques « grand prix du port de Fécamp » ont salué avec respect le «VIERGE DE LOURDES » reconnaissant en elle un authentique voilier de travail, une héritière des traditions du « Pays des Hautes Falaises ». C’est à plus d’un titre que la caïque « VIERGE DE LOURDES » peut s’enorgueillir d’être le premier navire de la région à avoir été B.I.P (bateau d’intérêt patrimonial) depuis le début de l’automne 2008. Yachts, youyous et kayaks de mer font preuve à notre égard du même intérêt.
XYLEME : Nom scientifique du bois, de la racine Grecque « Xulon » Bois.
XYLOPHAGE : Se dit de tout animal se nourrissant de bois. De gros vers blancs peuvent creuser des galeries dans les plats bords, pavois et jambettes. Ils sont redoutés à bord et sont un fléau aussi craints que leurs homologues marins les tarets dont seule la partie postérieure est recouverte de la coquille. L’injection de créosote et sans faire de pub de xylophène peut permettre l’éradication du mal.
YPORTAIS : Également surnommés « LES GRECS ». L’origine de ce sobriquet est confuse. Un libraire normand sis à Rouen a tenté d’apporter des réponses dans un article paru dans les annales du patrimoine de Fécamp. De même, l’étymologie du mot «caïque » est obscure, Y a -t-il un lien entre un caïque désignant un bateau des mers du Levant Grec ou Turc et un «caïc », ancien terme désignant une galère (rappelez -vous qu’à bord, on nage debout), quoiqu’il en soit ces deux mots recouvrent une appellation générique de barque. C’est ainsi que Maupassant dans ses contes (« L’Ivrogne » par exemple ou son roman « Une Vie ») qui ont Yport pour cadre dénomme ce type de bateau de travail. Une altération de l’anglais Ketch est également une hypothèse plausible. « On avait halé les barques de pêche haut sur la plage de crainte de la tempête qui s’annonçait ». C’est à peu près ainsi que débute « L’Ivrogne ». Un Yportais qui aurait quant à lui bu plus que raison du vin grec recueilli après le naufrage du « Zéphyr aurait été tout aussi «sâs »…